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ALBUM NIGRUM

L'Ouverture (index)

«Centurie Offertoire»​
Mon coeur d'enfant de la patrie
 Dont l'hymne est au plus faux amour,
    Mon amour fait sous ta furie 

     Qui le réarme à double tour...
     
(0: Hymne au Québec, édulcoré)

​Et te vaut cette centurie
 Offerte en bon choc en retour : 

Mode d'emploi : le grand texte en vers dont ce site fait l'objet a pour titre l'Album Nigrum.  Ce n'est pas à proprement parler un poème au sens lyrique du terme.  C'est une incantation divinatoire.  Il est vrai par ailleurs qu'elle use de procédés lyriques tels que l'art lyrique d'aujourd'hui n'en connaît plus guère.  La déclamation de l'ensemble du texte appelle normalement son entité inspiratrice à se manifester : Zila Kanta (plus connue sous les noms de la Vierge Noire, d'Erzulie Dantor, de Dakshina Kali, de Sara Kali, et de la Shulamite dans le concert de la mystique vernaculaire française, haïtienne, indienne, gitane et israélite respectivement) qui est de type frénétique et pétrifiant. Pour le récitant et les proches participants il doit s'en suivre en principe non seulement l'expérience mystique intense, passionnelle et souvent douloureuse qui caractérise sa présence, mais aussi un résultat bien concret.  Il vaut mieux que ce résultat soit voulu et demandé avec instance et préméditation par le récitant, et la demande faite pour autrui présent.  Autrement des conséquences bien plus chaotiques peuvent s'ensuivre d'une mise en branle irresponsable du processus appelé par l'oeuvre.

(description plus détaillée*) : Le résultat concret le plus typiquement voulu est la fascination en retour d'un objet d'amour-passion, avec l'atteinte du grand bonheur à deux espéré.  Il peut être aussi la mise en psychose d'un adversaire afin de se libérer de son emprise ou de ses mauvais desseins.  Les objets d'amour ou d'aversion ici considérés peuvent être des groupes voire des sociétés entières telles que des ordres religieux, des pays, des cercles, aussi bien que de simples personnes.  Le résultat espéré peut être encore l'obtention d'informations, d'éclaircissements ou de conseils quant à un des domaines du ressort cosmique de cette entité.  En premier lieu, sur tout ce qui ressort des grandes passions, des psychoses et des émeutes. Mais aussi sur l'Apocalypse, et sur les révolutions et autres cataclysmes sociaux plus généralement parlant : cette entité serait responsable non seulement de l'exégèse du célèbre texte de Saint-Jean, mais aussi de la mise en oeuvre de son contenu.

Ce n'est pas un texte à entendre, lire ou déclamer pour le simple plaisir, pour le prestige ou par curiosité.  Ce texte lu de façon profane, impure ou mondaine est en effet conçu pour déclencher une émeute dans l'assistance.  Et une psychose chez le sujet si celui-ci fait le clown pour lui seul.  Plusieurs ont même cru bon parler d'un livre maudit. Ce n'est toutefois pas un recueil de versets sataniques, ni au sens bien connu de Rushdie, ni de Baudelaire,  ni de Karl Marx, ni d'Aleister Crowley.  Ce n'est pas un propos religieux non plus.  La tradition lyrique française, à l'instar de l'Art Poétique de Boileau, préfère laisser toute discussion de dogme aux gens de religion proprement dits.  Et hors des strictes Paraboles, user de symboles tirés de religions mortes, sans autre effet supposé qu'esthétique.

Notre insistance sur le résultat concret à considérer ou craindre peut sembler de très mauvais goût selon la même tradition littéraire.  Un tel jugement de la part de ces gens découle avec évidence de leur idéal proverbial d'irresponsabilité en matière de passion amoureuse.  Et plus particulièrement de leur refus de toute prise en considération du fruit de leurs oeuvres.  Idéal que nous récusons : toute oeuvre déclamée ou chantée a sa muse inspiratrice.  Et aussi son effet concret sur le public, qui n'est pas seulement psychologique.  Il est de notre responsabilité d'en avertir ce dernier.  Les gens les plus à craindre en ce domaine sont l'immense majorité des auteurs contemporains qui n'en parlent jamais.  Et y sont pourtant bien plus experts qu'on croit.

Le texte de huit mille vers au grand total, dont la forme rimée est le pantoum javanais, comprend cent-un chants de dix double quatrains (sauf les deux derniers), presque tous octosyllabiques.  Il nécessite environ sept heures de diction soignée avec les pauses qui s'imposent pour la récitation complète faisant le plein effet voulu.  Curieusement pour une oeuvre de ce style littéraire classicisant, le style musical et le rythme le plus approprié à sa mise en forme sonore éventuelle est le rap américain.  Ou encore le slam. Ce genre de rythme pétrifiant convient le plus particulièrement et réduit le temps de récitation aux trois cinquièmes.

Voici sur cette page une suite de cent tableaux (cent-un tenant compte qu'un d'eux renvoie à deux chants, cent-deux avec le couplet d'introduction ci-haut, qui renvoie à une oeuvre non pas de nous mais de Gilles Vigneault* et Charles Trenet*) correspondant au deuxième couplet de chacun des chants, avec entre parenthèses ou entre crochets le lien hyper-texte y menant.  Les mêmes cent-un liens sont également accessibles par la liste déroulante sous le bouton carré escamotable du coin supérieur gauche, de même que par des références avant et arrière indiquées entre crochets à la fin de chaque chant.  Les liens à même le texte ou les commentaires sont indiqués par un discret astérisque à la suite du mot y référant.

Cette suite de cent tableaux qui suit peut également se lire en tant qu'oeuvre indépendante, ayant pour titre Centurie Offertoire.  Par centurie il faut entendre une suite de cent couplets, tout simplement.  Mais à interpréter de manière divinatoire. C'est un genre littéraire plus connu du grand public par le poète-devin Michel de Notre Dame, qui y excella.  Notre Centurie Offertoire, qui relève d'une toute autre démarche que la sienne (sauf sur le strict plan de la forme) fut à l'origine composée pour être offerte à un récipiendaire inconnu, qui survint effectivement.  C'est essentiellement une prière où l'on s'offre en vue de l'accomplissement d'un plus grand oeuvre ultérieur à réaliser avec lui ou elle, d'où son appellation.  Centurie Offertoire est donc présenté ici comme oeuvre en soi, bien qu'elle soit aussi une table de matières expressive pour qui veut s'orienter dans le site (en plus du menu déroulant), et une ouverture de genre opéra pour qui entreprend la lecture de l'Album Nigrum* (disponible en continu) au complet :

​
Centurie Offertoire

Ma barque vague et voyageuse
 Qui vogue au but sans se hâter,
     Ma tête ogive si chercheuse

      Que je sens pleine à éclater.
       (1: La Tête Chercheuse)

Les bercements de mon enfance

 Aux airs de Saint-Germain des Prés,
     Les lendemains de la souffrance

      À l'aube des auvents pamprés.
      (2: Saint-Germain-des-Prés)

Les derniers pas de mon folklore
 Dansés dans l'île d'Orléans,
     Celle où Leclerc faisait éclore
      Un nouveau cycle de péans.
      
 (3: New Orléans) 


Le couteau fou de Riopelle
 Beurrant les gigues de Vigneault,
    Ma déception qui en appelle
     Au sacrifice de l'agneau.
      (4: L'Agneau)

Les quais putrides du Pirée

 D'où trois enfants m'avaient souri,
    Leur mouise que j'ai désirée
     Quand la chantait la Mercouri.
      (5: Destination-Soleil)

La Seine lente et corrosive

 Des premiers disques de Ferré.
    Tout ma vie à la dérive
     Du charme qu'ils ont opéré.
      (6: La Seine)

Les vers de l'âme inassouvie

 Qui écoutés plus de trois fois
    Rendent inapte pour la vie
     À emboucher les porte-voix.
      (7: Les Porte-Voix)

Le jazz du temps du phonographe

 Qui fleurait bon Sydney Bechet,
    Cette musique de carafe
     Que dans les bals on débouchait.
      (8: Sydney Bechet)

Le disque d'or de Piaf la môme,

 Rayon de son dernier couchant,
    Lustre de pur cristal de baume
     Éclaté sous son propre chant.
      (9: Le Disque d'Or)

Argent, violence, sexe et drogue
 Quadruple rendez-vous des as,
    Coup de poker le plus en vogue
     À la fortune de Dallas!
      (10: Dallas)

Le défilé sous l'édifice

 Où un tireur se recueillit
    Pour consommer le sacrifice
     Dont le pouvoir s'enorgueillit.
      (11: Le Sacrifice)

Mon dérespect aux majorettes

 Qu'on voit passer chaque mardi
    Mettre leur flamme aux cigarettes
     Des assassins de Kennedy.
      (12: Le Tombeau de Kennedy)

Le riche hymen de Jacqueline

 Sitôt en terre le cercueil,
    Le vieux pays que sa marine
     Maintient toujours dans son orgueil.
      (13: Jacqueline)

La boîte de Monsieur Surprise,

 Polichinelle et baladins,
    Mon émission qu'ils ont remise
     Pour faire place à ces gredins.
      (14: Les Gredins)

Mon premier cours de politique
 En douze jours de longs ennuis,
    Le lourd métrage méphitique
     Qui n'a fait qu'épaissir depuis.
      (15: Cours de Politique)

Mon premier cours de tragédie
 Télévisé en mon Québec,
    Le fleuve noir que j'étudie
     Faute d'avoir appris le grec.
      (16: Cours de Tragédie)

Les lauriers de l'ennui scolaire

 Que je cueillais adolescent,
    Mon amertume et ma colère
     De m'être cru intéressant.
      (17: Printemps Canadien)

Les faux problèmes que Corneille

 Mit dans la tête des héros
    Qu'en un lycée on ensommeille,
     Et puis qu'on nimbe de zéros.
      
(18: Corneille)

La peccadille que Racine
 Crut bon vêtir de hauts remords ;
    Le dénouement que je machine
     Pour fracasser tous les records.
      (19: Racine)

Les bords paisibles de Trézène

 Où Phèdre se donna la mort,
    Ma confession de schizophrène
     Qu'on y lira au bar du port.
      (20: Confession)

Les grands desseins de ma jeunesse :

 Des plans pour d'autres Brasilia,
    Où je dessine une négresse
     En larmes sous les magnolias.
      (21: Brasilia)

Mon long désir d'être urbaniste

 À l'égal de le Corbusier,
    Ce nom qui désormais m'attriste
     Et sonne creux dans mon gosier.
      (22: Le Corbusier)

La projection d'un grand ensemble

 Dont j'ai fait rêve sur papier,
    La rage au ventre dont je tremble
     À voir pousser le vrai clapier.
      (23: Le Clapier)

Végétation d'un cœur malade

 Qui a poussé en vrai ciment
    Et qu'il faut moudre en marmelade
     Pour en faire un médicament.
      (24: Marmelade)
​

La peau des jeunes que bourgeonne

 La chaude haleine de la nuit,
    Les drapeaux noirs de la Sorbonne
     Au mois de mai de soixante-huit.
      (25: Soixante-Huit)

Le surf sur vague de colère

 Du bateau ivre où je cinglais,
    Mon mal de m'être laissé faire
     Mousse au service des Anglais.
      (26: Les Anglais)

Ce pays où l'arrière-garde

 Du monde entier s'en vient pourrir,
    Hubert Aquin dans sa mansarde
     Cherchant des causes pour mourir.
      (27: La Mansarde)

Les camemberts que l'on importe

 Pour exposer sur les buffets
    Et en tuer la fleur trop forte
     Pour épargner les nez peu faits.
      (28: Les Nez Peu Faits)

Les camarades qu'on appelle

 Des pays rouges de soleil,
    Leur sang de vin qui se congèle
     Sitôt goûté notre sommeil.
      (29: Notre Sommeil)

Le bar de ma cité natale

 Qui a vu poindre Jacques Brel ;
    Pour notre brume plus étale,
     Un plus terrible ménestrel.
      (30: Le Ménestrel)
​​

Notre voisin le Petit Prince

 Qu'a croqué Saint-Exupéry
    Faisant escale en ma province
     Dans le zinc où il a péri.
      (31: Souvenance)

L'aigle dont l'aile est psychiatrique,

 Palais du prince de Koninck ;
    L'autre supplice symétrique
     Qui se consomme sur le zinc.
      
(32: L'Aile Psychiatrique)

Notre seul plus ou moins poète,
 Le schizophrène Nelligan ;
    Cette œuvre digne d'un prophète
     Pour le venger d'un ouragan.
      (33: Le Prophète)

Le mauvais sang que je m'obstine

 À recracher sur l'argument
    Tranquillisant qu'on me cuisine
     Pour ma santé supposément.
      (34: L'Argument)

Le pus que rend ma peau rosie

 Par la rancœur dont mon sang bout,
    L'essence de ma poésie
     Qui coule par le mauvais bout.
      (35: Le Mauvais Bout)

Le son des cordes de mes nerfs

 Que je tendrais sur un violon
    Pour mieux produire les concerts
     Que je martèle du talon.
      (36: Les Nerfs)
​

Ma gestuelle tourmentée

 Dans le foyer des yeux des lynx,
    Cri de mon âme ensanglantée
     Soumise à la question du Sphinx.
      (37: Le Sphinx)

Mon cœur que font battre en panique

 Ceux dont je suis administré
    Quand, dans leur gorge métallique,
     Parle un message enregistré.
      (38: Les Morts-Vivants)

La foule au cirque sombre et laide

 Sur un tableau peint par Goya ;
    Ma danse sur la corde raide
     Que bande ma paranoïa.
      (39: Metanoia)


Mon front en ruines qui essuie
 Les coups de bec des oiseaux noirs,
    Leurs bombes de fiente et de suie
     À la guerre des éteignoirs.
      (40: Les Éteignoirs)


L'odeur canaille qu'on tolère
 Sous le soleil voilé de smog,
    L'orage acide qui éclaire
     Sur la mer d'huile au lac Magog.
      (41: Magog)

Le paquebot qui fait naufrage

 Dont le pilote se plaint fort
    De la lenteur du nettoyage
     Aux employés du bar du bord.
      (42: Le Naufrage)

L'inondation sépia qui chasse

 De plus en plus de voyageurs
    Qui revendiquent une place
     Dans les étages supérieurs.
      (43: L'Inondation)
​

La forteresse sicilienne

 Qui se bâtit sur nos échecs.
    Le mat sans contre-jeu qui tienne
     À l'adversaire en deux coups secs.
      (44: Les Échecs)


Les blanches îles d'Ionie
 Qui tinrent tête aux rois d'Iran.
    Leur langue grise d'ironie
     Qui résista sous le Coran.
      (45: L'Ironie)

Les flots de l'autre mer Égée

 Sous les hauteurs de Charlevoix,
    En rage sous l'humeur figée,
     Privés de leurs tragiques voix.
      (46: Charlevoix)

Le preux gréviste de Pologne

 Qui lutte par la religion,
    Le même qui en Catalogne
     Veut la chasser de la région.
      (47: La Religion)

La pente abrupte que je grimpe

 Sous les orbites des corbeaux,
    Le feu de foudre de l'Olympe
     Dont je couronne mes flambeaux.
      (48: L'Olympe)

Le rire jaune de la torche,

 Dernière étape du relais
    Avant de mettre à feu le porche
     Du panthéon chicagolais.
      (49: Les Chicagolais)


Le labyrinthe de Nouillorque
 Plein du butin des vases grecs,
    Le Minotaure au longs crocs d'orque
     Qui veut du sang pour ses kopecks.
      (50: Les Kopeks)

Les intérêts du Minotaure,

 La chair des jeunes de son vœu ;
    La banque au lion ailé que dore
     Le Tiers-Monde à sang et à feu.
      (51: Le Tiers-Monde)

Le long crachat que j'expectore

 Aux réalistes du malheur
    Voulant calmer le Minotaure
     D'autres envois de gars en fleur.
      (52: Le Malheur)

Le convoi morne de Thésée

 Voilé de crêpe vers Minos,
    Ma promenade malaisée
     Sous les corniches de Patmos.
      (53: Le Convoi)


Mon écritoire sous la ronce
 À l'ombre d'un figuier douillet,
    Sa couleur tendre qui annonce
     La chaleur proche de juillet.
      (54: Premier Juillet)


Les péristyles blancs d'Athènes
 Où discouraient les tragédiens,
    Les larmes de nos Madeleines
     Pour réveiller les Canadiens.
      (55: Les Canadiens)

La classe instruite convertie

 Par l'astrologue du salon,
    Comme autrefois par la Pythie
     Du sanctuaire d'Apollon.
      (56: Le Salon de l'Ésotérisme)

Mon sentiment qu'alors à Delphes

 Parlait l'argent des Phéniciens
    Que firent continuer aux Guelfes
     Leurs successeurs les Vénitiens.
      (57: Les Magiciens)

Les beaux choreutes de l'Hellade

 Dansant au son des bouzoukis
    Pour soulager mon cœur malade
     Des lourds concerts des Suzukis.
      (58: Venise)

Cet air nordique qu'ensoleille

 Mon cri de guerre au monstre odieux,
    Près de ma plume une bouteille
     Du vin le plus aimé des dieux.
      (59: Le Monstre Odieux)

Les vignes nobles de la Grèce,

 Nectar qu'incarne le Samos,
    Le raisin d'or que le pied presse
     Au péristyle du Cosmos.
      (60: Le Cosmos)


Le blé ployant sous la lumière
 D'un ciel méditerranéen,
    Les coups que frappe à la chaumière
     Un orage hyperboréen.
      (61: Orage Hyperboréen)

La trompette et la caisse claire

 Qu'on fait sonner sous le préau,
    Le groupe rassemblé sur l'aire
     Prêt pour la danse du fléau.
      (62: Le Préau)

Le cri d'alarme d'Archimède

 Ayant trouvé la solution
    Au chant funèbre de l'aède
     En sortant de son ablution.
      (63: La Solution)
​

Quelques tours de vis d'Archimède

 Dans le barrage des médias.
    Sous le béton qui d'un coup cède
     Un lac de brandons immédiats.
      (64: Les Médias)


Mon ambition si peu commune
 Que ni le sceau d'un président
    Ni le jonc de Dame Fortune
     Ne me rendraient moins dissident.
      (65: L'Ambition)


Les vers des âmes dégourdies
 Que l'on voudrait mettre en prison.
    La suite de mes tragédies
     À presque leur donner raison.
      (66: La Prison)


Mon serment de mégalomane
 Aux jouvenceaux qu'on abêtit
    Et que l'on veut mettre en cabane
     Dès qu'ils ne pensent plus petit.
      (67: L'Appétit) 

Le bleu au bridge qui postule

 Candidement le grand chelem.
    Les plis tombant au crépuscule.
     La coupe de Jérusalem.
      (68: La Coupe de Jérusalem)

Mon seul coup face à l'hypocrite

 Qui ne sort pas ses gros canons.
    Ma carte offerte qui l'invite
     À décliner tous ses prénoms.
      (69: Les Guenons) 


La fin prochaine d'un roi veule
 Qui me jette un vieil étendard.
    Le pion qui fonce dans la gueule
     Du loup avant qu'il soit trop tard.
      (70: L'Étendard) 


Ma boule noire sur l'allée
 Qui tourne et roule vers l'abat.
    Mon argument sur sa volée
     Pour démolir le faux débat.
      (71: Le Faux Débat) 


Mon char lancé dans la carrière
 Les crocs des tigres du moteur.
    L'espoir d'atteindre la clairière
     Pour y croquer l'hydre en fureur.
      (72: La Carrière) 

L'espoir d'atteindre leur pâture

 De leur livrer mon cauchemar.
    Leur croc déçu qui me triture
     Pour peu que j'arrête mon char.
      (73: Le Cauchemar) 

Mon char lancé sur l'autoroute

 La Gestapo dans le miroir.
    L'embranchement vers sa redoute
     Dont je vais faire un ostensoir.
      (74: L'Ostensoir) 

Mon front bombé qu'on dit maboule

 Qui roule sur le tapis vert.
    La pyramide qui s'écroule.
     La bille rouge à découvert.
      (75: Tapis Vert) 

La trajectoire difficile

 Du croisé vers la Saint-Tombeau
    Que la croisière du missile
     Va retraçant d’un clair flambeau.
      (76: Le Gala des Gémeaux) 

Ma trajectoire pas très droite

Qui tourne en rond et perd le nord
    Et ceint de plus en plus étroite-
     Ment l'étoile de la mort.
      (77: La Trajectoire) 

La mèche noire qui tournaille,

 Part en flammèches vers son but.
    Mes démêlures en bataille
     De calvitie à son début.
      (78: La Mèche Noire) 

Le filament sous la pupille

 Qu'à coup de botte on emboutit.
    Dans le grisou une escarbille
     Et un brasier qui engloutit.
      (79: L'Escarbille) 

L'invention de la dynamite,

 Prix de la paix dû à Nobel.
    L'écroulement de l'anthracite.
     La lumière au bout du tunnel.
      (80: Prix Nobel) 
​

Le ciel qu'ils bouchent de désastres

 Et font pleurer sur mon destin.
    La douche froide des vrais astres
     Qui vont pleuvoir sur leur festin.
      (81: Le Festin) 

Le ciel tout noir vêtu des voiles

 Dont on occulte le trafic.
    Le crépuscule des étoiles
     Tombant sur le pavé à pic.
      (82: Le Trafic) 

L'idole dont la voix éteinte

 Ne s'entend bien que sur fond noir.
    Ses fesses dont l'affiche est peinte
     À mettre à feu pour mieux te voir.
      (83: L'Idole) 

L'étoile verte de l'absinthe

 Où l'ouvrier voyait l'espoir,
    Qui va sombrant dans la mer teinte
     Du soleil rouge du Grand Soir.
      (84: L'Espoir) 

Le krach de la comète chauve

 Perdant son or sur son sentier.
    Le dernière âme qui se sauve.
     La déception du siècle entier.
      (85: Krach) 

Le feu sacré qui va éclore

 Au bas des sombres paravents.
    La bombe rose de l'aurore
     Après la nuit des morts-vivants.
      (86: Les Paravents) 

Le plan routier que me caviarde

 L'encre pesante de la nuit.
    Mes pas futurs que je regarde
     Se suivre sous l'éclair qui luit.
      (87: L'Éclair Qui Luit) 

Le cagibi du Labyrinthe

 Dont le plan-guide fut perdu.
    Le fil d'Ariane sous la plinthe
     Qu'un haut voltage tient tendu.
      (88: La HauteTension) 

Mon pied au marbre de la dalle

 Qui cache les interrupteurs.
    La vue entière du dédale
     À la clarté des projecteurs.
      (89: Les Interrupteurs) 

L'apparition du Minotaure

 Sous le fracas des bancs publics.
    Les étincelles du phosphore
     La mitraillade des déclics.
      (90: Les Bancs Publics) 
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La peur des bombes que j'adresse

 Au fils du peuple et au dauphin,
    Commencement de ma sagesse
     Bien qu'elle n'en soit point la fin.
      (91: La Peur des Bombes) 

Les ruines de l'amphithéâtre,

 Cratère d'un volcan éteint,
    Où humblement triomphe un pâtre
     Du vil spectacle qu'on y tint.
      (92: Volcan Éteint) 

L'étoile de mon émeraude

 Dans ton écrin de velours noir.
    La torche de ma tête chaude
     Brillant sur fond de désespoir.
      (93: L'Écrin) 

Ce même souffle chaud qui pousse

 Depuis la fleur qui va s'ouvrir
    Jusqu'au titan à la rescousse
     Du monde entier qu'il voit souffrir
      (94: Le Souffle Chaud) 

Ce feu sacré que l'on éprouve

 Au lent martèlement des vers.
    Cette étincelle que l'on couve
     Pour traverser les longs hivers.
      (95: Les Vers) 

Ce formidable feu de fonte

 Qui fond les mots de mes couplets,
    Qui chaque fois que trop peu monte
     Laisse les moules incomplets.
      (96: Les Couplets) 

Les carres fines de mon moule

 Pour vérifier si le degré
    Du souffle chaud dont je me saoule
     Fond bien l'airain à tout son gré.
      (97: Mon Moule) 

Les dures marches en cadence

 Que vient de faire ma teuf-teuf.
    Le plein d'essence et d'espérance
     De tuer la bête en plein dans l'œuf.
Ton coeur en rut et en souffrance
 Où mon sang s'est remis à neuf

    Ton monde à mettre enfin en transe
     Où foncer comme un mâle boeuf.

La langue de la douce France
 Dont notre temps s'était cru veuf.
    La certitude de la chance
     Au bout de la preuve par neuf.
      (98: La Teuf-Teuf) (99: Preuve par Neuf)

Les traits brûlants du ciel antique

 Qui ont tanné ma vieille peau.
    La preuve du feu poétique
     Avant de prendre le drapeau.
      (100: Le Drapeau) 

Le bien fondé de cette étude

 Que tous les autres pourront voir
    Mon cœur béant de gratitude
     À la lumière du Grand Soir.
      (101: L'Étude)

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