581 Pour fuir le bien si mal acquis Par le patron qui nous surveille, Emmène-moi dans ton maquis Faire le mal qui t'émerveille.
Cet air nordique qu'ensoleille Mon cri de guerre au monstre odieux. Près de ma plume une bouteille Du vin le plus aimé des dieux.
582 Au clair de ce grand soir radieux Qui luit au bout de mon allée, Rends mes sanglots plus mélodieux Face à la glace accumulée.
L'onde enfin libre et défoulée A beau former plus d'un ruisseau, L'embâcle au bout de sa coulée Ne peut céder que d'un morceau.
583 Au signe fixe du verseau S'accroche en vain la foi hippie. En devenant ton vermisseau, Je saurai la mettre en charpie.
À l'université impie, Je ne suivrai pas d'autre cours Que ton tonnerre qui épie La voix en quête de secours.
584 C'est quand le chant de leurs amours Est menacé d'horreurs certaines Qu'on voit enfin des troubadours Prendre place auprès des fontaines.
Comme jamais n'en vit Athènes Fleurissent les talents nouveaux, Mais les seuls films les plus quétaines Ont la faveur des gros cerveaux. 585 Les censeurs baissent leurs niveaux Quand la tendresse enfin s'étale, Et non quand, dans les noirs caveaux, La nudité est plus totale.
La drogue ne fait plus scandale : On n'en veut plus qu'aux trop gros cœurs : L'ébriété qu'on dit mentale Fait rager bien plus de moqueurs.
586 Ce n'est plus l'âme des liqueurs Qui tient en veille la police, Elle a l'œil rivé aux marqueurs De l'ingrédient d'un autre vice.
C'est la main que tend Béatrice Dans l’enfer que vit l’écrivain. C'est sa caresse admiratrice Qui fait qu'on l'injurie en vain.
587 C'est l'amour fait par le bovin À ta hauteur spirituelle. C'est le frou-frou du pleur divin Sur ton image sensuelle.
Il a beau mettre à la ruelle, Il fait marcher d'un pas de roi. Un grand danger de mort cruelle Ne fait que l'augmenter en soi.
588 Au clair de l'offre de l'emploi Qui je postule en ce poème, On dira de mauvais aloi Quelque expression qui fait qu'on aime.
Chaque fleur que ton amour sème Fait rêver de révolution. Pour reporter ce gros problème, L'état se ruine en subvention.
589 Plutôt que de faire attention De ne froisser l'âme trop bonne, On rayera de la nation Tout corps qui tant soit peu rayonne.
Les éditeurs de l'Hexagone Ont jugé bon de m'oublier. Je crois que ceux du Pentagone Tarderont moins à publier.
590 Une autre fois pour se plier Aux ordres d'un certain ancêtre, On a mis sous le bouclier Une autre étoile en train de naître.
Je me suis dit qu'il est peut-être Mieux de laisser au monstre odieux Lui-même soin de reconnaître Ses ennemis les plus radieux.