861 J’ai eu beau prendre les devants Ou rester dans l’arrière-garde, Je reste avec les desservants De l’ordre noir qui me canarde.
Le plan routier que me caviarde L'encre pesante de la nuit, Mes pas futurs que je regarde Se suivre sous l'éclair qui luit.
862 Quand ta chanson fait un beau bruit À me remplir de nostalgie : Elle dit ton pays détruit Par le passage de l’orgie.
J’allumerai donc ma bougie Au bal qu'on dit de tes maudits, En dansant sur ton énergie Je referai ton paradis.
863 Une fille a les yeux hardis Et un suave commérage : C'est pour me prendre aux interdits Qui mettront son parrain en rage.
En montrant bien au loin l'orage À la baigneuse au grand soleil, Je ferai fondre le mirage Qui la maintient en son sommeil.
864 Quand par le chant d'un dur réveil, J’ai voulu faire la lumière, C’était branché à l'appareil Obscurcissant la terre entière.
Je cacherai donc ma prière À tout monsieur trop distingué, Et en perdant ma tête fière J'aurai ta main au doigt bagué.
865 Pour m’être adolescent ligué Aux amateurs de la romance, Je suis resté depuis dragué Par les oiseaux de la démence.
Toutes les fois que semble immense Un grand génie à l'horizon, Laisse-moi voir que recommence La valse de la déraison.
866 Pensant détruire une prison, J’ai mis en branle un drapeau rouge : Ce que j’ai gagné pour maison Est un plus misérable bouge.
Mais quand la grande peur me gouge Sous l'avalanche des regrets, Fais-moi sentir que mon cœur bouge De par tes charmes très secrets.
867 En me prenant dans les attraits Que j’avais crus d’un autre monde, J’ai marché pour d’autres décrets Du même ancien régime immonde.
Quand d'un coup la révolte gronde, Fais voir l'argent en grand devoir De diffuser sur une autre onde Pour ne pas perdre le pouvoir.
868 Quand il m’a plu de me mouvoir Dans ton atoll aux eaux turquoise, Le paradis que j’ai cru voir Cachait ton coeur que l’on déboise.
De crème anglaise à la framboise Ne laisse plus fermer mon bec, Et je saurai briser l'ardoise Tout près de nous laisser à sec.
869 Une maîtrise en savoir grec N’apprend qu’à être un meilleur traître D’un peuple voué à son échec Et le grand art de s'en repaître.
Quand je serai ton enfant maître De rien sinon son corps tout nu, Tu me feras enfin connaître Le savoir le plus malvenu.
870 Ce que ton peuple a obtenu Après sa si glorieuse guerre Est un destin si saugrenu Que j'entends s'esclaffer la terre.
Mais du sol rouge de ta terre Où l'adversaire a tout détruit, Vers le ciel noir qui nous enserre Je vois monter l'éclair qui luit. < Les Paravents | Index |La Haute Tension >